dimanche 19 novembre 2023

Un Galgo ne vaut pas une cartouche de Jean-François Fournier


 











Éditeur : Olivier Morattel Éditeur
Parution : 10/10/2023
Nombre de pages : 166
Genre : Littérature suisse

L'auteur : 











Jean-François fournier, né le 12 janvier 1966 à Saint-Maurice, est un journaliste et écrivain suisse. Il a été rédacteur en chef du grand quotidien Le Nouvelliste puis de la mythique Revue Automobile. Romancier, dramaturge, poète et biographe, il est l'auteur, notamment de neufs romans, dont Alcools de Vienne, La nuit qui tua Juan Don et Le village aux trente cercueils, ainsi que d'une biographie de référence sur le peintre Egon Schiele.

Un Galgo ne vaut pas une cartouche est son vingt-sixième ouvrage.

Quatrième de couverture : 

Si vous n'y prenez garde, vous pourriez croire que là, dans vos mains, se succèdent dix récits distincts qui parlent d'artistes hors du commun, de capitales européennes riches d'histoires anciennes et également de peinture, de musique, de littérature.

Pourtant, un personnage mystérieux et attachant tisse un fil ténu entre chacune de ces pérégrinations - des rues ouvrières du vieux Barcelone au Vienne des avant-gardes, de la Prague du jazz et du théâtre noir à la Zurich branchée, de la Scala de Milan aux grands hôtels parisiens, en passant par Marseille et Genève. Et transforme le chapelet qu'elles composent en une saga, un grand roman d'épopée qui vous transporte directement au cœur du processus de création et dans les recoins les plus inaccessibles d'un cerveau d'artiste.

Mon avis : 

« L'oubli est une science l'ami. Comme une gueule de crocodile, il nous entraîne au fond, là où règnent la vase et l'obscurité. Il détruit nos abris les plus secrets. Compresse nos sentiments et nos amours pour en faire des sculptures sans âmes.  »

En Espagne, les Galgos sont des lévriers employés pour chasser le lièvre sans fusil. Gare à celui qui ne remplit pas son contrat et déçoit son maitre le "galguero". Pour laver son honneur qu'il estime souillé par la défaillance de l'animal, le possesseur du chien devra passer par le sang et l'animal sera souvent torturé et tué dans des conditions effroyables (chiens pendus à des arbres, jetés dans des puits ou abandonnés à leur sort en pleine nature avec les membres brisés...). Pour le galguero, un coup de fusil serait une mise à mort bien trop clémente. D'où l'expression " Un Galgo ne vaut pas une cartouche" ! 
Dans ce roman, on suit les tribulations  de Lady Canela, qui échappe de peu à la mort en étant recueillie par Ludwig, un écrivain étranger en mal de succès qui vivote dans un quartier borgne de Barcelone. A son trépas, la chienne sera adoptée par divers maîtres et elle va sillonner l'Europe du Nord au Sud en leur compagnie. 
Les dix chapitres qui composent le roman se déroulent chacun dans une grande capitale européenne chargée d'histoire. Au fils de ces différents récits, l'auteur nous régale des traditions culturelles et culinaires du lieu visité et des joyaux de l'architecture propres au lieu. Il évoque également quelques grandes figures incontournables qui ont marqué l'endroit de manière indélébile et laissés leur empreinte dans leur discipline !

A travers les aventures picaresques de cette attachante levrette blanche à la pointe des oreilles couleur cannelle, c'est toute l'Europe des Arts et des Lettres qui défile sous nos yeux. Qu'ils soient peintres, musiciens, écrivains, danseurs, critiques gastronomiques, chanteurs lyriques… tous ces êtres qui vivent à fond leurs passions et dont les âmes sont plus ou moins torturées, vont connaître un sort particulier et parfois tragique au contact de la majestueuse Lady Canela. 
"Un Galgo ne vaut pas une cartouche" est un roman érudit, grisant et étourdissant, qui nous entraîne dans une folle sarabande. 
La beauté des Arts peut-elle nous sauver de la cruauté des hommes ? Telle est la question !



Merci aux Éditions Oliver Morattel.
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mercredi 6 septembre 2023

Psychopompe d'Amélie Nothomb

 














Éditeur : Albin Michel
Parution : 23/08/2023
Nombre de pages : 162
Genre : littérature française

L'auteure :

Amélie Nothomb est une écrivaine belge de langue française. Elle est née le 13 août 1967 à Kobe, au Japon, où son père, le baron Patrick Nothomb, fut ambassadeur de Belgique. Belgique, qu'elle ne connaîtra qu'à 17 ans, pour y terminer ses études de philologie romane à l'Université libre de Bruxelles.
Depuis 1992, Amélie Nothomb publie aux éditions Albin Michel un roman par an.
Stupeur et tremblements, roman de son expérience professionnelle au Japon, sera récompensé en 1999 par Le Grand Prix du roman de l'Académie française.

Quatrième de couverture :

"Ecrire, c'est voler."

Mon avis  :
           
« Désormais, écrire, ce serait voler. Je ne suggère pas que me lire soit un exercice d'altitude, je sais que quand j'atteins mon écriture, je vole. Mon rêve prit sens. Oui, j'avais découvert la gymnastique qui permettrait de s'envoler : il s'agit de se positionner d'une manière particulière à l'intérieur de soi, de saisir le bon angle et la juste distance et de se précipiter.  »

Pas de rentrée réussie sans un roman d'Amélie Nothomb. Marcher dans les feuilles mortes, savourer la chaleur d'un velouté de potiron et déguster les écrits de la romancière belge préférée des français adoucissent le passage vers l'hiver. 
Cette année, cette dernière renoue avec le récit autobiographique. Après avoir consacré un roman dédié à son défunt père diplomate, cette dernière nous livre quelques bribes de son enfance écorchée par un viol survenu au Bangladesh, quand elle avait douze ans. Elle nous raconte son naufrage dans l'anorexie dix ans durant, la dissociation mentale puis sa résurrection par l'écriture grâce à son amour des volatiles. 
Une passion pour les oiseaux datant de son enfance, native d'un conte nippon qui l'a particulièrement marqué et qui fait office d'introduction à ce récit intime aussi lumineux que douloureux. Pour l'auteure, "écrire c'est voler". Cette dernière nous confie que dès qu'elle a pris la plume, elle a eu la sensation de prendre enfin son envol et de mettre à distance les tourments qui la dévorait ! Une renaissance même si ce ne fut pas un accouchement sans douleur 

Récit protéiforme mêlant ornithologie, souvenirs de jeunesse enchanteurs comme douloureux, rapports à la mort et secrets d'écriture, le dernier roman d'Amélie Nothomb est passionnant de bout en bout. 
Avec la pudeur et la sensibilité à fleur de peau qui signent son écriture si singulière, j'ai passé un délectable moment avec la touchante Dame au chapeau.
Amélie Nothomb est une madeleine de Proust délicieusement régressive qui fleure bon la rentrée ! 


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dimanche 13 août 2023

A nos jours heureux de Laurent Scalese













Éditeur : Plon
Parution : 01/06/2023
Nombre de pages : 332
Genre : littérature française

L'auteur : 












Laurent Scalese est auteur de romans policiers et scénariste pour le cinéma et la télévision. Il a notamment créé la série à succès Cherif, diffusée sur France 2. Après La Voie des âmes, Je l'ai fait pour toi et Pour le bien de tous, publiés chez Belfond, À nos jours heureux est son dixième roman.

Quatrième de couverture :

Depuis onze ans, Judith dirige sa propre maison d'édition avec succès. Femme passionnée et accomplie, son monde s'écroule le jour où elle apprend, lors d'un examen de routine, qu'elle est atteinte d'un cancer du sein. Le crabe a fait son nid, en silence, lentement, sans crier gare...
Au cours de ses semaines de traitement, l'éditrice fait la rencontre de trois personnalités hautes en couleur qui ne semblent pas avoir renoncé à la vie, bien au contraire. Nicolas, agent artistique célibataire, dont la principale vertu est de ne jamais être de mauvaise humeur ; la pétillante Lola, avocate et franche du collier ; et Grégory, bourlingueur solitaire et mystérieux. Ces quatre-là ne tardent pas à devenir amis. Ensemble, ils fondent un groupe, le Club des crabes rasés, au sein duquel ils s'affranchissent des conventions, et surtout de la peur, vivant intensément chaque minute qui leur est donnée.

À nos jours heureux, une tragi-comédie sur l'amitié et la vie qui replace l'humain au centre de toute épreuve.

Mon avis :

« Le merveilleux, le miracle, chacun appelle ça comme il veut, est invisible aux yeux des personnes en parfaite santé, elles sont trop occupées à courir après la vie et le temps, enchaîna-t-elle d'une voix habitée.
Il nous apparaît, à nous malades, partout où il se trouve, dans les moindres recoins où il se niche, car nous sommes plus conscients que quiconque de la beauté et de la fragilité de l'existence. »

Suite à une banale mammographie de contrôle, la vie de Judith va s'effondrer. L'annonce de son cancer du sein va la plonger dans un univers inconnu et terrifiant, bouleversant toutes ses certitudes et l'amenant à revoir ses priorités. 
Un malheur n'arrivant jamais seul, son conjoint, trop lâche pour affronter la maladie avec elle, prend le large sans se retourner. 
Dans un premier temps, c'est en sa mère, une vieille dame fantasque et attachante, et en sa fille, une adolescente en pleine crise identitaire, qu'elle trouvera le soutien moral et le réconfort nécessaire pour lui permettre de faire face aux pinces acérées du crabe. 
Puis un jour, lors d'une séance de chimiothérapie, elle va faire la connaissance de trois patients qui vont révolutionner sa vie, lui donner le courage de se battre et lui permettre de retrouver le goût du bonheur malgré les aléas d'une vie affectée par la maladie.
Un nouveau chapitre de sa vie va s'ouvrir avec cette improbable et lumineuse amitié. Une alliance qui s'avéra précieuse, quand un terrifiant cumulonimbus viendra menacer leur existence à tous…

Comment parler du cancer sans effrayer le lecteur et sans tomber dans l'excès de pathos ? Un exercice périlleux que l'auteur a habilement réussi avec cet attachant roman plein de sensibilité. 
J'avoue que j'avais quelques appréhensions à entamer et poursuivre cette lecture, ayant dans mon entourage proche une personne affectée par cette pénible maladie. Alors, même si l'auteur a préféré éviter de rentrer dans les détails de la lourdeur des traitements et de l'intense épuisement qu'ils occasionnent tant physiquement que moralement, ce roman reflète tout de même assez bien la réalité du quotidien des personnes touchées par la maladie. 
Comme son titre l'indique, c'est un roman qui se veut avant tout résolument positif. Avec une dose d'humour bienvenue, il apporte une belle note d'espoir, une bouffée d'air vivifiante et (re)donne le sourire aux lèvres ! 
Merci à l'auteur pour cette belle bouffée d'optimisme et de vitalité !



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dimanche 18 juin 2023

Le code d'Yves Montmartin


 











Éditeur : La chouette à lunettes
Parution : 08/04/2023
Nombre de pages :
Genre : 276

L'auteur : 















Yves Montmartin est né à Saint-Etienne en 1953 et il souffre depuis son enfance de bibliophagie, maladie qu'il soigne avec de la lecture matin, midi et soir. La bibliothèque associative dont il est un des bénévoles est devenue son centre de soins. L’écriture du "livre qui vole", son premier roman, doit être considérée comme une thérapie. Il est également l'auteur du roman "Anaïs", paru en 2018,"Sept jours au Mazet-St-Voy" sorti début 2020 aux éditions du Venasque, La mauvaise herbe (2020) et Brindille (2022).

Quatrième de couverture :

Je suis convaincu que pour rester impuni, ne pas se faire prendre, il ne faut pas commettre le meurtre de trop. Ma décision est arrêtée, quoiqu’il advienne je m’en tiendrais à cinq. Cinq crimes, pas un de plus pas un de moins, cela me semble un nombre raisonnable. De toute façon, je n’ai pas idée de la quantité minimum nécessaire de meurtres pour avoir droit au titre de tueur en série.
Sincèrement et sans me vanter, je pense que j’ai toutes les cartes en main, il ne reste plus qu’à attendre le bon moment et surtout les bonnes personnes qui feront des victimes idéales.

Mon avis :

« Un représentant de commerce, c’est comme un curé, plus il est jovial et rondouillard, plus on lui fait confiance. »

Contrairement à ce que son patronyme pourrait indiquer, le mal nommé Philippe Fortunier est loin d'être né sous d'heureux auspices. Entre la violence d'un père alcoolique et un physique replet qui lui a attiré de nombreux quolibets de la maternelle à l'âge adulte, on entame la lecture de ce livre avec une bonne dose de compassion envers le malchanceux. 
Un élan empathique vite réfréné quand on découvre les noirs desseins du (faussement) sympathique représentant de commerce des établissements BonyA la lecture d'un polar au titre évocateur (Le boucher), ce dernier décide d'entamer une carrière de tueur en série. Planifiant ses crimes avec minutie à l'aide d'un carnet rouge sang et obéissant à des règles rigoureuses, il écume la Région Rhône-Alpes à la recherche de ses proies, toutes des femmes choisies sur des critères très précis. 
Ce dernier va donner du fil à retordre aux forces de police qui se sentent dépassées face à des meurtres aussi odieux qu'inexplicables. Tant par le profil disparate des victimes que par l'absence de mobile apparent. Un véritable casse-tête chinois… 
Se laissant griser par la facilité à exécuter ses crimes et par l'impuissance des forces de l'ordre, le rusé meurtrier va multiplier les risques.
Saura-t-il s'arrêter à temps et échapper à la sagacité des enquêteurs ? Le crime parfait existe-t-il vraiment comme il semble le croire ?  

Empruntant les codes du roman policier, l'auteur brosse le portrait non dénué d'humour d'un personnage cynique et dépourvu de compassion, pour qui le crime ne représente qu'un divertissant jeu tactique et les victimes de simples pions sur un échiquier. On avance avec autant d'effroi que d'amusement dans la lecture de cette intrigue soigneusement construite, découvrant avec effarement le parcours macabre de ce personnage dénaturé et sans vergogne. 
Par ailleurs, le titre du roman ne prend tout son sens qu'à la fin du récit, et on ne peut que saluer l'habileté de l'auteur à se jouer si facilement de nous ! 




Merci à Yves Montmartin.
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samedi 20 mai 2023

Tronche, Rosépine de Philippe Curval

 













Éditeur : La Volte
Parution : 04/05/2023
Nombre de pages : 211
Genre : littérature française

L'auteur :











Philippe Tronche à l’aube des années trente, Philippe Curval a cheminé avec les surréalistes, fréquenté de nombreux écrivains comme Boris Vian, Topor, participé à la naissance de la première librairie de science-fiction, de la première revue de science-fiction. Sur son solex, il a fait le tour de la France, de l’Italie, de l’Allemagne en ruines. Comme journaliste, il a arpenté le monde. Son œuvre, qui se joue des codes (et parfois en invente), a été couronnée par de nombreux prix. Philippe Curval partage aujourd’hui son temps entre Paris et la baie de Somme.

Quatrième de couverture : 

Surgie d’un épisode fiévreux de Philippe Curval lors d’un séjour à l’hôpital, la saga de la famille Tronche met en scène une héroïne avant-gardiste et libre, incarnation des années 60’ : Rosépine.
Fuyant sa famille vers Paris dès son plus jeune âge, certaine de porter en elle un destin singulier, Rosépine devient tour à tour maçonne, styliste en tricot pour les plus grandes maisons de mode. Avant de s’installer dans un village insolite dans ses Cévennes natales afin de réaliser une œuvre picturale, révolutionnaire pour son temps, qui l’amènera à la conquête de New York.
Paysages magnifiques, rencontres amoureuses et sensuelles, plongée visionnaire au cœur de l’art contemporain, l’auteur s’inspire de faits et personnages issus de ses fantasmes familiaux, pour raconter une époque, dans un tourbillon des sens. Plus qu’une autofiction, une extrafiction.

Mon avis :

« Elle plongea son regard vers le visage de son fils qui la  scrutait avec  intensité. Un vrai coup au cœur ! Tout cet édifice qu'elle avait construit pour préserver son statut de femme indépendante s'effondra subitement. Comme par un  de  ces effets bizarres qui se produisent lorsqu'on découvre un véritable intérêt pour un être, une chose qu'on  avait négligée jusqu'à présent, son fils lui apparut tel qu'elle ne l'avait jamais vu. C'est un phénomène qu'elle avait ressenti dans le secteur de l'art, où l'œuvre d'un peintre qui lui semblait négligeable, hors de propos, si loin de tout ce qu'elle appréciait, devenait d'un seul coup l'objet d'une passion. De pareils phénomènes s'étaient déjà produits chez elle dans le domaine du jazz où, sur l'incitation de Karen, elle s'était soudainement éprise de Thelonious Monk alors qu'elle refusait d'écouter autre chose que Claude Luter. Même révélation à propos d'un acteur, d'une sensation gustative. Et oui, c'est ce qui venait de lui arriver, son fils avait la saveur de l'amour. »

Nous sommes dans les années 1960 et la jeune Rosépine Tronche rêve de liberté. Partant sur les traces de Stevenson, un havresac au dos (mais sans ânesse), cette dernière décide de parcourir Les Cévennes narrées par le baroudeur-écrivain. Un périple qui s'avèrera mouvementé mais surtout décisif dans le canevas de son avenir, avec la rencontre de l'insolite Adéodat Palmer. 
Sauvage mais pas farouche, la jeune femme suit ses instincts et ses envies sans peur du qu’en-dira-t-on. Sa seule crainte étant que l'on entrave son inétanchable soif de liberté ! Exerçant les métiers les plus improbables et audacieux pour une femme de son époque, Rosépine qui est aussi douée en tricotage qu'en maçonnerie, va se lancer dans un pari insensé en voulant révolutionner le domaine de l'art contemporain. 
De la Lozère à New York en passant par Paris, la jeune femme intrépide va vivre d'épineuses aventures avant de (re)trouver le chemin de la félicité !  
  
Quel drôle d'OVNI littéraire que ce roman. Il est absolument inclassable ! 
Tour à tour amusant, déroutant, émouvant et impertinent, c'est l'ouvrage le plus loufoque que j'ai lu depuis bien longtemps (le dernier étant "En attendant Bojangles" qui remonte à 2016). 
On y croise une galerie de personnages plus picaresques les uns que les autres et si leurs aventures sont aussi farfelues que celles vécues par un Ignatius Reilly*, on ne peut que s'amuser des petits coups de griffes et des moqueries sous-jacentes de l'auteur envers les travers mercantiles et versatiles du marché de l'art contemporain.
Une sympathique découverte que ce roman, dont l'écriture est diablement moderne pour un auteur qui a dépassé les quatre-vingt dix printemps !

* "La conjuration des imbéciles" de John Kennedy Toole.




Merci aux Éditions La Volte et à Babelio.
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samedi 22 avril 2023

La fabrique du corps humain de Jérémie André

 












Éditeur : Olivier Morattel
Parution : 19/01/2023
Nombre de pages : 136
Genre : littérature Suisse

L'auteur :













Né en 1987 à Yverdon-les-Bains, Jérémie André est médecin à Vevey. Il tient depuis trois ans un blog au carrefour entre médecine, psychiatrie et société, sur la plateforme numérique du journal suisse Le Temps.

Quatrième de couverture : 

Un soir d'été, trois individus se rencontrent par hasard dans un fast-food de l'emblématique quartier lausannois du Flon : Dominique, jeune interne en médecine, Anna, équipière au sein du Brother Burger et Jean-Pierre, gérant de l'enseigne de restauration rapide.

Dominique et Anna ont eu une liaison quatre ans auparavant. Dans la lumière blafarde du fast-food, sous le regard inquisiteur de Jean- Pierre, ils se demandent ce qui les a poussés à se quitter et s'interrogent sur ce qu'est devenue leur vie - qui ressemble tant à une impasse.

À la fois théâtre d'anatomie et théâtre des passions humaines, La Fabrique du corps humain est un véritable roman des corps. Le corps comme objet d'étude et de savoir. Le corps dépositaire des angoisses de l'homme contemporain. Et le corps modelé, traversé et parfois détruit par les exigences prédatrices du capitalisme sauvage.

Mon avis :

« Les travailleurs sont transformés par le labeur comme l'animal par l'homme. Les mains s'écorchent, les peaux se tannent et les ventres pourrissent sous l'influence des infections transmises durant le bref réconfort de l'amour. A l'image de la bête, la vie de l'habitant du Flon est courte. Déjà, il retourne dans la chaleur intestine de la terre rejoindre par la putréfaction de son corps le grand cycle organique duquel il s'était brièvement extirpé. »

Localisé dans une ancienne vallée, qui pour lutter contre l'insalubrité fut comblée au cours du 19ème siècle, le quartier du Flon conserve le nom d'une rivière aujourd'hui souterraine. C'est dans ce cadre, animé par de multiples transformations, que l'auteur va faire évoluer ses personnages, témoins du temps qui passe et de bouleversements qui bien souvent les dépasse. 
A travers les parcours croisés d'Anna (formatrice dans la restauration rapide) de Dominique (interne en médecine) et de Jean-Pierre (gérant d'un fast-food), Jérémie André brosse un tableau des maux qui affectent les corps comme les esprits dans nos sociétés actuelles. De la tendinite du poignet générée par des mouvements répétitifs en cuisine aux angoisses existentielles liées à nos choix de vie, l'auteur cartographie une géographie du corps impactée par le temps qui passe, par nos choix de vie, la maladie ou les limites que nous imposent nos sociétés en constantes mutations.

Médecin tout comme Dominique, l'un des personnages phares de ce roman, Jérémie André connaît bien l'anatomie du corps humain et les ravages causés par les affres de la maladie. 
Dans ce récit articulé en trois partie : anamnèse familiale, anamnèse actuelle et catamnèse, l'auteur raconte (en parallèle des tribulations des différents protagonistes de cette histoire) la métamorphose de ce quartier lausannois et de sa population, du milieu du XVIIIème siècle à nos jours. 
Modelés par l'évolution de la société : les mutations économiques, l'évolution de la médecine et le changement des mentalités, les acteurs de cette histoire se retrouvent happés malgré eux par les tourments, les transitions, les turbulences et les passions parfois contrariées que la vie jalonne sur leur trajectoire. 
Dans ce roman au titre emprunté à l'anatomiste de la Renaissance André Vésale, l'auteur nous entraîne avec brio dans un tumultueux maelström des corps et des âmes !




Merci aux Éditions Olivier Morattel.
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dimanche 19 mars 2023

Chut, c'est un secret de Seo Mi-Ae

 













Éditeur : Matin calme
Parution : 07/10/2021
Nombre de pages : 268
Traduction : Jihyun Kwon
Genre : Polar coréen

L'auteure : 


















Seo Mi-Ae est une star du polar en Corée. Elle débute avec des poèmes parus dans la presse. Puis, en 1994, elle publie son premier roman policier qui connait de suite un immense succès : Les trente meilleures façon d'assassiner son époux. Son second, Le jardin des poupées, reçoit le premier prix du Polar coréen. Depuis, elle a acquis une grande popularité avec ses nouvelles criminelles publiées dans la presse et adaptées au théâtre et au cinéma.

Quatrième de couverture : 

Ne vous fiez jamais aux apparences.
Quatre ans après les événements de " Bonne nuit maman ", Ha-yeong vit toujours avec son père et avec Seon-gyeong (laquelle n'a donc pas été mortellement empoisonnée à la fin du T1, même si un doute subsiste sur les intentions de Ha-yeong).
Quand commence ce second opus, Jun Jae-seong, père de la petite et époux de Seon-gyeong, précipite le déménagement de toute la famille à Sokcho. C'est pour Ha-yeong la découverte d'un nouveau collège. Or récemment une jeune fille a été tuée. Un gang de harceleuses du collège pourrait être mêlé à cette mort et Ha-yeong va devoir leur faire face – et faire face à ses propres démons.
Mais au fil du roman une ombre ne cesse de croître jusqu'à recouvrir tout le récit, l'ombre du père, un homme peut-être plus complexe qu'il ne paraissait, avec un passé qui est loin d'être simple...
Un deuxième opus qui fait basculer la trilogie vers une autre personnalité, peut-être au centre de tout, à savoir Jun Jae-song, pervers narcissique et manipulateur, tandis que l'état psychique de sa fille laisse voir des nuances plus humaines. 

Mon avis :

« Une blessure physique peut être vue par tous ; une plaie au cœur n’est connue que par celui qui en souffre. Et si la famille en est la cause, cette blessure se double de désespoir. »

Second volet d'une trilogie entamée avec "Bonne nuit maman", ce thriller coréen nous permet de renouer avec la jeune criminologue Seon-Gyeong et son intriguante belle-fille Ha-Yeong. 
Quatre ans après les terribles événements qui ont secoués la famille recomposée, cette dernière va s'agrandir et le ménage a besoin de plus d'espace. Ils décident de quitter Séoul pour une petite ville côtière où l'époux de Seon-Gyeong possède une maison de famille. 
La petite Ha-Yeong a bien grandi. Elle est maintenant une adolescente rebelle au caractère versatile qui a conservé son tempérament colérique. Celle-ci réagit très mal à l'annonce de la grossesse de sa belle-mère et à ce déménagement imprévu. Seon-Gyeong doit user de toute sa patience et de sa diplomatie pour éviter les escarmouches et maintenir l'unité de la cellule familiale. 
C'est dans cette ambiance électrique que les membres de la famille vont devoir faire face aux nuages qui planent au-dessus leurs têtes. Pendant que le couple formé par Seon-Gyeong et son mari se délite, Ha-yeong se passionne pour la récente disparition d'une adolescente de son âge. Un excès de curiosité qui va l'entraîner sur une pente glissante. 
Fugue, enlèvement, meurtre ? Qu'est-il arrivé à la jeune Yu-ri ? Quels mystères et drames se cachent sous la disparition de la jeune collégienne ? 
Vouloir percer des secrets bien gardés n'est pas sans comporter de risques. Impossible de rebrousser chemin une fois la boîte de Pandore ouverte !

Deuxième opus d'une trilogie, "Chut, c'est un secret" est encore plus machiavélique que le précédent. Des personnages complexes et dénués de manichéisme, une intrigue retorse à souhait et une immersion dépaysante dans la société sud-coréenne. Harcèlement scolaire, violences familiales et secrets de famille sont les principaux thèmes abordés dans ce thriller psychologique à l'ambiance anxiogène.
Vivement la sortie du dernier volet de cette trilogie addictive !



Merci à Babelio et aux Éditions Matin Calme.
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dimanche 26 février 2023

Ceux d'ici ne savent pas de Heather Young













Éditeur : Pocket
Parution : 10/11/2022
Nombre de pages : 460
Traduction : Carla Lavaste
Genre : Littérature américaine

L'auteure :












Américaine, Heather Young a débuté une carrière dans le droit avant de se lancer à la poursuite de son rêve : l'écriture. Titulaire d'un MFA du Bennington College Writing Seminars, elle a suivi de nombreux ateliers d'écriture avant de publier son premier roman, Un été près du lac (Belfond, 2017 ; Pocket, 2019), sélectionné pour le prestigieux Edgar Award for Best First Novel. Ceux d'ici ne savent pas est son deuxième roman.

Quatrième de couverture :

Dans le décor aride des plaines de l'Idaho, Heather Young tisse un roman poignant, un suspense psychologique d'une grande finesse où s'animent des personnages vibrants, qui restent longtemps dans les mémoires.
Adam Merkel, professeur de mathématiques du collège de Lovelock, Idaho, est mort ce matin. C'est Sal Prentiss, l'un de ses élèves, qui vient de découvrir le cadavre de ce quadra sur un bûcher dressé dans le canyon.
Une annonce terrible qui secoue cette petite ville et remue profondément la jeune professeure Nora Wheaton. Elle qui se sentait liée à Adam par une solitude et une souffrance communes veut comprendre : qui pour assassiner aussi brutalement cet homme sans histoires.
Alors qu'elle plonge dans le passé de son défunt collègue, Nora réalise peu à peu que Sal, ce jeune orphelin timide et farouche, semble en savoir bien plus qu'il ne veut le dire… Avec lui, la jeune femme se lance dans une enquête délicate. Une plongée aux confins de l'âme des habitants de cette région oubliée du monde, qui portent en eux un héritage fait de violence et de survie dont ils n'ont plus conscience.

Mon avis : 

« Pi est défini par le cercle, et le cercle est la forme la plus parfaite de la création. Il est aussi au cœur des cycles, qui sont au temps ce que le cercle est à l’espace. Sans pi, impossible de définir un processus cyclique. On le retrouve partout où il y a des ondes, des orbites ou des motifs. Dans le rythme des océans et celui de la musique, dans le battement cardiaque et la rotation des planètes autour du soleil. D’une certaine manière, c’est bien plus qu’un nombre. C’est l’un des fils du tissu de l’univers. »

Qui était vraiment Adam Merkel dont le corps a été retrouvé calciné à proximité du canyon de Limerick ? 
Pourquoi ce brillant universitaire était-il venu s'enterrer dans un bled comme Lovelock quelques mois avant sa disparition pour enseigner les mathématiques à des collégiens ? Cachait-il quelques secrets inavouables ? 
C'est ce que cherche à découvrir Nora, une collègue enseignante qui s'était prise d'affection pour ce quadragénaire d'un abord sympathique mais plutôt réservé, plus passionné par les nombres et les jeux d'échecs que par ses congénères. Intriguée par le passé nébuleux d'Adam, cette dernière va chercher à en savoir plus sur ce pair trop discret, son enquête l'amenant à s'interroger sur des pans de son propre passé qu'elle avait relégué dans les limbes de sa mémoire.
Dans cette petite ville du Nevada, loin de Las Vegas et de ses casinos, tout le monde se côtoie et personne ne se connait vraiment. La rumeur va bon train, bruissant de moult suppositions et affabulations qui n'aident pas la police dans ses investigations pour résoudre une enquête qui piétine. 
Nora, Jake le pompier qui a découvert le corps carbonisé d'Adam et Sal, l'élève préféré du professeur défunt, s'expriment à tour de rôle dans ce roman choral. Des confessions qui vont petit à petit lever le voile sur une vérité infiniment plus complexe qu'il n'y paraît et sur les sombres secrets des différents protagonistes en lien avec ce drame inexpliqué. C'est toute la petite ville qui va s'embraser quand les certitudes des uns et les œillères des autres s'effondreront comme un château de cartes… 

Avec ce roman particulièrement sombre, l'auteure brosse le portrait d'une petite bourgade américaine d'apparence tranquille dont les fondations vont être terriblement secouées suite à un crime féroce. Pauvreté, isolement et addictions multiples gangrènent ce microcosme, dépeint à l'antithèse du « Small town life » d'un Norman Rockwell.
Dans ce récit immersif au suspense savamment dosé, Heather Young s'attaque notamment à la crise des opioïdes et ses ravages aux Etats-Unis (à lire également sur le sujet "L'empire de la douleur" une enquête passionnante et particulièrement détaillée du journaliste d'investigation Patrick Radden Keefe sur la famille Sackler à l'origine de la mise sur le marché de l'OxyContin).
Une plongée hallucinante dans une Amérique à rebours des images d'Epinal couramment véhiculées !



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dimanche 15 janvier 2023

Tuer Pétain de Pascal Chabaud


 











Éditeur : Signe
Parution : 28/10/2022
Nombre de pages : 260
Genre : policier

L'auteur : 



















Né en 1959, Pascal Chabaud est professeur d'histoire-géographie en Auvergne. Il a participé à la réalisation d'un documentaire "Le magazine du mineur" diffusé sur la chaîne de télévision France 3 Nord-Pas-de-Calais.
Il est également l'auteur de "Mort d'un sénateur" (2018).

Quatrième de couverture : 

Qui a tué Gaston Tournayre, pharmacien à Clermont-Ferrand ?
Violeur, escroc et avorteur, il comptait d’innombrables ennemis. Au cours de l’automne 1941, alors que le régime de Vichy fait face aux premiers attentats contre l’occupant allemand et que la Police aux Questions Juives se met en place, Joseph Dumont mène l’enquête, et déjoue in extremis un attentat contre le Maréchal Pétain dont disparition entrainerait la mise sous tutelle du pays par l’Allemagne ! Parviendra-t-il à neutraliser le tueur ? Cette tentative d’attentat est-elle liée au meurtre du pharmacien et au réseau de Justes qui émerge ? À lui de le découvrir !

Mon avis :

« La guerre est un cadeau fait au capital, et je ne peux m'empêcher de penser à mon père dont la fortune augmente exponentiellement avec la durée des combats. Lui aussi doit suivre avec attention la progression des champs de bataille en espérant que la guerre sera longue. »

Dans ce second opus des aventures de Joseph Dumont, policier et résistant, nous retrouvons le jeune inspecteur de police auvergnat qui doit faire toute la lumière sur le meurtre d'un pharmacien clermontois. 
Irréprochable le pharmacien ? Au fil de son enquête, le policier va découvrir que ce dernier était loin d'être un citoyen modèle et qu'il cachait de très vilains secrets. 
Son enquête le mènera jusqu'au village de La Garde où vivent ses géniteurs, des exploitants viticoles. Un retour aux sources qui lui réservera bien des surprises, l'amenant à s'interroger  sur la complexité de la nature humaine, capable du pire comme du meilleur.
En parallèle de l'investigation sur ce crime, Joseph Dumont sera dépêché auprès du gouvernement provisoire de Vichy pour encadrer les déplacements du Maréchal Pétain.
Nous sommes au cœur de l'automne 1941 et la France vaincue et occupée par les allemands vit de sombres heures. A la tête du régime de Vichy, le Maréchal Pétain et son gouvernement contraints de faire allégeance au 3ème Reich doivent composer avec les exigences démesurées de l'occupant. Profitant d'une cérémonie de commémoration du 11 novembre, un habile tireur embusqué tente d'abattre le Maréchal Pétain (un événement fictif glissé dans ce récit dont nombres d'anecdotes sont réelles). Une tentative d'homicide déjouée par l'inspecteur Dumont qui sera chargé de retrouver le tueur et de mettre fin à ses visées meurtrières

Deuxième volet d'une série d'enquêtes menées pendant la seconde guerre mondiale, ce polar historique au rythme soutenu et riche en rebondissements nous plonge dans le terrible quotidien des français à l'heure de l'occupation. Privations, délation, lois et mesures ignoblement injustes et arbitraires, tortures… ponctuent ce récit au plus proche de la vérité d'une époque troublée où les juifs et les communistes étaient pourchassés par le pouvoir en place.  Etayé d'extraits du journal La Montagne de l'époque et de notes et références historiques, ce polar instruit son lecteur tout en le distrayant avec une intrigue policière habilement construite qui tient le lecteur en haleine !

 

Merci à Pascal Chabaud.
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jeudi 1 décembre 2022

Une vie d'artistes de Alexandre Page

 













Éditeur : Alexandre Page
Parution : 16/07/2022
Nombre de pages : 350
Genre : littérature française

L'auteur :








Alexandre Page est né en 1989 à Clermont-Ferrand. Docteur en histoire de l’art, auteur d’une thèse sur le graveur-illustrateur Léopold Flameng (1831-1911) soutenue en 2017, il poursuit aujourd’hui ses recherches sur l’estampe et la peinture du XIXe siècle et a publié plusieurs ouvrages et articles scientifiques sur le sujet. Passionné par l’écriture, il décide après sa thèse de se consacrer aussi à la fiction. Partir, c’est mourir un peu est son premier roman abouti. Il est un des cinq ouvrages finalistes du prix du jury des Plumes francophones organisé par Amazon KDP. Il a depuis publié plusieurs romans et recueils de nouvelles, disponibles en librairies et sur toutes les plateformes numériques.

Quatrième de couverture :

« Les lauriers de la gloire se fanent vite. » Philéas Chasselat, peintre au succès déclinant en fait l’amer constat lorsque l’inspiration le fuit et que sa bourse se vide. Clémence Soyer, jeune artiste ambitieuse, est encore inconnue mais aspire à la renommée dans le Paris bouillonnant de la Belle Époque. Mis sur le chemin l’un de l’autre, ils vont affronter l’hypocrisie de la société, les déconvenues si nombreuses de la vie d’artiste et tenter, malgré les revers, de triompher ensemble.
A la fois roman sentimental et historique, réflexion sur les aspirations individuelles et les exigences d’un monde étriqué, Une vie d’artistes interroge sur les libertés et la dépendance du créateur, sur ses rêves de gloire et ses désillusions, sur les fragilités du couple et sur "l’amour médecin".

Mon avis : 

La gloire est une chose étonnante. Elle peut traverser les siècles, les millénaires parfois, et pourtant, elle peut s’enfuir et revenir en un instant aussi volatile que la constance des hommes. 

Après avoir connu la renommée avec ses peintures militaires et brillé dans les salons par sa popularité d'artiste en vogue, Philéas Chasselat se retrouve dans le creux de la vague. Sa bourse se vide aussi vite que son inspiration et son carnet d'adresses. Dans le Paris de la fin du 19ème siècle, un artiste déchu se retrouve très vite à la rue et Phileas redoute de sombrer dans la misère. Un seul ami ne lui a pas encore fermé sa porte, Nicolas Dignimont, un financier prospère aussi avisé que Philéas est inconséquent. 
Lorsque ce dernier l'invite à la pendaison de crémaillère qui suit son mariage, le peintre qui est au bout du rouleau va découvrir que la vie peut parfois vous réserver d'heureuses surprises. Il tombe immédiatement sous le charme de Clémence, une cousine de son ami banquier avec qui il partage le goût pour la peinture de batailles. C'est avec joie qu'il accepte de dispenser son art à la jeune femme. La complicité qui naît entre eux va vite se transformer en sentiments plus tendres. Son mariage avec Clémence lui apportera la stabilité financière qui lui manquait et lui permettra d'exercer son art sans redouter les fins de mois difficiles. 
Des rêves de gloire plein la tête et des papillons dans le cœur,  les jeunes amoureux vont malheureusement vite déchanter, confrontés aux carcans de la Belle Époque. Ils vont apprendre à leurs dépens que le talent et le courage ne suffisent pas pour réussir dans le domaine des arts et qu'il ne fait pas bon braver les conventions et vouloir changer les règles de l'ordre établi…

Remarquablement documenté, ce roman sentimental et historique embarque habilement son lecteur dans le milieu artistique de la fin du 19ème siècle. 
De Paris à Deauville, des clubs élitistes aux tripots de jeux clandestins, Alexandre Page nous entraîne dans un univers délicieusement suranné.
Avec de jolies formulations et une écriture élégante, l'auteur nous narre les succès et les déboires d'un couple de peintres cherchant à apaiser leur soif de reconnaissance. Rêvant de triompher au Salon, l'incontournable manifestation artistique de l'époque qui légitimise le statut d'un peintre, ces derniers vont redoubler de ruse pour essayer d'y parvenir, prenant le risque de voir leur univers se fracasser sur l'autel de la gloire. 
Ce récit est également une peinture au vitriol de la misogynie, de la tartuferie et de l'étroitesse d'esprit d'une époque où la femme était considérée comme un être frivole assujetti et vivant dans l'ombre de son seigneur et maître d'époux. 
Enfin, ce roman alliant légèreté et réflexion est un excellent réquisitoire en faveur de la liberté de création !


Merci à Alexandre Page.

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